Publié le 15 mars 2024

Contrairement à l’idée reçue, la mission principale de votre professeur n’est pas seulement de vous enseigner, mais de produire du savoir nouveau.

  • Le temps de recherche d’un enseignant-chercheur représente la majorité de son activité et nourrit directement la qualité de ses cours.
  • En comprenant ses travaux, vous pouvez trouver des sujets de mémoire originaux et même vous initier à la recherche.

Recommandation : Changez de posture. Cessez de voir votre professeur comme un simple diffuseur d’informations et commencez à le considérer comme un partenaire intellectuel, une porte d’entrée vers les coulisses de la science.

Je vous vois, assis dans l’amphithéâtre. Pour beaucoup d’entre vous, je suis celui qui parle pendant deux heures, celui qui donne les lectures obligatoires et qui, à la fin, corrigera vos examens. Une fois le cours terminé, je disparais jusqu’à la semaine suivante. La question que vous ne vous posez peut-être jamais est : mais que fait-il le reste du temps ? La réponse commune est souvent simplette : il prépare ses cours. C’est vrai, mais c’est terriblement incomplet. Cette vision rate l’essentiel, la partie immergée de l’iceberg qui justifie notre présence devant vous.

La vérité, c’est que nous, les enseignants-chercheurs, menons une double vie. Une vie partagée entre la transmission du savoir et, surtout, sa création. Cette deuxième casquette, celle de chercheur, n’est pas un hobby ou une activité annexe. C’est le cœur de notre métier, la machine qui alimente tout le reste. Mais si la véritable clé de votre réussite n’était pas seulement d’écouter passivement nos cours, mais d’apprendre à « pirater » notre activité de recherche ? Si vous pouviez transformer ce que vous percevez comme un lointain travail de laboratoire en un atout stratégique pour vos études, votre mémoire et même votre future carrière ?

Cet article n’est pas un cours de plus. C’est une invitation dans mon quotidien, dans les coulisses de mon laboratoire et de mon bureau. Je vais vous montrer comment fonctionne cet écosystème unique au monde. Ensemble, nous allons voir comment cette activité de recherche, loin d’être une distraction, est la meilleure garantie de la qualité de votre formation, et surtout, comment vous pouvez activement vous en servir pour devenir bien plus qu’un simple étudiant.

Pour bien comprendre comment tirer parti de cette double compétence, nous explorerons ensemble les différentes facettes de ce métier méconnu. Ce parcours vous donnera les clés pour interagir plus intelligemment avec nous et transformer votre cursus universitaire.

Que fait vraiment un enseignant-chercheur quand il n’est pas en cours ? Plongée dans un laboratoire de recherche

L’image d’Épinal du professeur est tenace : des piles de livres, un amphi, des copies à corriger. Pourtant, notre service d’enseignement, qui peut sembler dense, ne représente qu’une fraction de notre travail. Pour un poste à temps plein, le cadre légal fixe notre service à 192 heures d’enseignement par an, ce qui correspond à environ un tiers de notre temps de travail global. Alors, que se passe-t-il durant les deux autres tiers ? C’est là que se niche le cœur de notre métier : la recherche. Ce n’est pas un « plus », c’est notre mission principale.

Cette activité de recherche est protéiforme et souvent invisible pour vous. Elle comprend des tâches bien plus variées que l’image du savant seul devant ses éprouvettes. Mon quotidien, comme celui de mes collègues, est rythmé par :

  • L’évaluation par les pairs : Je passe des heures à lire et critiquer de manière anonyme les articles soumis par d’autres chercheurs à des revues scientifiques. C’est un travail de l’ombre, essentiel au contrôle de la qualité de la science.
  • Le management d’équipe : J’encadre des doctorants et des post-doctorants, de jeunes chercheurs que je guide dans leurs propres travaux. C’est une forme de transmission très différente du cours magistral, basée sur le mentorat.
  • La recherche de financements : L’argent ne tombe pas du ciel. Une grande partie de mon temps est consacrée à la rédaction de projets complexes pour convaincre des agences nationales ou européennes de financer nos recherches.
  • La valorisation et la diffusion : Nous voyageons pour présenter nos résultats dans des conférences et des colloques, où nous confrontons nos idées à celles de la communauté internationale.
  • L’administration : Eh oui, nous participons aussi à la vie de l’université à travers divers conseils et commissions, où se décident les orientations pédagogiques et scientifiques.

Cette immersion dans la recherche n’est pas une simple curiosité. Des initiatives comme le projet VidéoLabo de Nantes Université, qui invite des youtubeurs scientifiques dans les laboratoires, montrent bien cette volonté d’ouvrir les portes de nos « ateliers ». Ils permettent de documenter le travail réel, de la collecte de données à la publication, pour démystifier ce qui se passe loin des amphis.

Ainsi, lorsque vous me voyez en cours, vous ne voyez que la partie émergée d’un iceberg d’activités qui visent toutes à produire et valider de nouvelles connaissances. C’est ce « capital-recherche » qui donne sa valeur à l’enseignement que vous recevez.

Comment poser une question intelligente à un enseignant-chercheur (et obtenir une réponse utile)

La fin d’un cours est souvent un moment étrange. Parfois, un silence s’installe. D’autres fois, une main se lève pour une question purement logistique sur l’examen. Rarement, une question de fond émerge. Ce n’est pas par manque d’intérêt de votre part, j’en suis convaincu, mais souvent par une forme d’autocensure ou par la crainte de « déranger ». Pourtant, instaurer un dialogue scientifique avec nous est l’un des meilleurs moyens de vous approprier la matière et de vous démarquer.

Poser une « question intelligente » ne signifie pas poser une question à laquelle personne n’a la réponse. Au contraire, c’est poser une question qui montre que vous avez commencé à réfléchir. C’est passer du statut de consommateur de savoir à celui de participant. Pour y parvenir, voici quelques stratégies que j’apprécie particulièrement lorsque des étudiants viennent me voir :

Plan d’action : pour une interaction efficace avec votre professeur

  1. Préparez le terrain : Avant de venir me voir, montrez que vous avez fait un effort. Une simple phrase comme « J’ai lu votre dernier article sur X, et un point m’a interpellé… » change complètement la nature de notre échange.
  2. Formulez une problématique : Au lieu de « Pouvez-vous m’expliquer le concept Y ? », essayez « J’ai compris que le concept Y fonctionne comme ceci, mais comment s’applique-t-il dans le cas Z que nous avons vu ? ».
  3. Proposez une hypothèse : N’attendez pas une réponse toute faite. Lancez-vous : « En lisant tel auteur, j’ai l’impression qu’il contredit votre approche sur ce point. Est-ce que je me trompe ? ». C’est le début d’un vrai débat.
  4. Choisissez le bon canal : Une question rapide après le cours est parfaite pour une clarification. Pour une discussion complexe, privilégiez un email avec un objet clair (« Question sur le cours X – Votre nom ») pour me permettre de vous répondre de manière réfléchie.
  5. Connectez-vous à mes recherches : La meilleure façon de capter mon attention est de lier votre question à mes travaux. « Votre cours sur A m’a fait penser à votre recherche sur B. Y a-t-il un lien ? ». C’est la porte d’entrée royale.

L’objectif de cette démarche est de transformer une simple interaction en une collaboration intellectuelle. C’est un changement de posture qui vous sera bénéfique tout au long de votre parcours.

C’est dans ce genre d’interaction que le savoir se transmet le plus efficacement, bien au-delà de ce que je peux dire dans un amphi bondé.

En agissant ainsi, vous ne demandez pas seulement une information, vous sollicitez mon expertise d’artisan du savoir, et c’est une demande à laquelle je ne peux que répondre avec enthousiasme.

Comment trouver un sujet de mémoire original en lisant les publications de vos professeurs

Le choix du sujet de mémoire est souvent une source d’angoisse. La peur de la page blanche, l’impression que « tout a déjà été dit », la difficulté à trouver une idée à la fois originale et réalisable. Et si je vous disais que vos futurs directeurs de recherche ont déjà balisé le terrain pour vous, directement dans leurs propres publications ? Un article scientifique n’est pas une vérité gravée dans le marbre ; c’est une conversation, une étape dans un processus. Et comme toute conversation, elle laisse des portes ouvertes.

Un chercheur est obligé par la rigueur scientifique de reconnaître les faiblesses de son propre travail. C’est là que se niche votre opportunité. Pour « pirater » le système et trouver une idée brillante, voici une méthode en quatre temps que je conseille à tous mes étudiants :

  • Lisez la fin des articles : La partie la plus importante pour vous n’est pas l’introduction, mais la conclusion. Cherchez systématiquement les sous-sections intitulées « Limites de l’étude » ou « Perspectives de recherche futures« . C’est ici que votre professeur liste lui-même les questions qui restent sans réponse. C’est une mine d’or.
  • Enquêtez sur les débats : Repérez les auteurs que votre professeur cite fréquemment, puis cherchez les articles où ces mêmes auteurs sont en désaccord. Identifier un point de friction, une controverse, même minime, est un excellent point de départ pour un mémoire.
  • Croisez les flux : Si vous hésitez entre deux matières, regardez les travaux de deux de vos professeurs. Existe-t-il une zone d’intersection, un sujet où leurs deux expertises pourraient se combiner de manière inédite ? C’est souvent là que se trouvent les sujets les plus innovants.
  • Remontez le temps : Parcourez les publications de votre professeur sur des plateformes comme Google Scholar ou HAL. Il y a 5 ou 10 ans, il a peut-être exploré une piste qu’il a depuis laissée de côté, faute de temps ou de moyens. Reprendre ce fil abandonné peut être un sujet de mémoire fantastique.

Cette démarche de « lecture active » des travaux de vos enseignants est la méthode la plus sûre pour proposer un sujet qui non seulement les intéressera, mais pour lequel ils auront déjà une expertise solide à vous offrir. C’est aussi une façon de montrer votre sérieux et votre engagement dans la discipline.

J’ai développé sur la chaîne une section qui s’appelle Les Essais HNLD, où j’invite des chercheurs à venir présenter leur livre ou autres contenus de manière punchée en 10 minutes.

– Laurent Turcot, Entretien avec l’Acfas

L’historien et youtubeur Laurent Turcot illustre bien cette volonté croissante des chercheurs de rendre leurs travaux accessibles. En vous intéressant à leurs publications, vous ne faites que répondre à une main tendue.

Votre sujet de mémoire n’est pas caché au fond d’une bibliothèque obscure ; il est souvent écrit noir sur blanc, dans les propres conclusions de celui ou celle qui vous dirigera.

Vous êtes passionné par un sujet ? Comment proposer à votre prof de vous initier à la recherche

Vous avez suivi les étapes, vous avez un sujet qui vous passionne, vous avez établi un dialogue scientifique avec un de vos professeurs. Et maintenant ? L’étape suivante, pour les plus motivés, peut être de franchir le pas et de demander à être initié à la recherche. Cela peut sembler intimidant, mais c’est une démarche que nous, chercheurs, apprécions. C’est le signe d’une véritable vocation intellectuelle. Cette initiation peut prendre plusieurs formes, du simple stage volontaire dans un laboratoire à des dispositifs plus structurés comme le doctorat.

Une des voies royales pour mettre un pied dans le monde de la recherche tout en gardant un lien fort avec le monde de l’entreprise est la thèse CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la Recherche). Ce dispositif permet de réaliser sa thèse en étant salarié d’une entreprise et encadré par un laboratoire universitaire. C’est un véritable pont entre deux mondes, qui offre le meilleur des deux. Le salaire minimum brut annuel est d’ailleurs fixé et évolutif, passant de 25 200 € en 2024 à 27 600 € en 2026, ce qui en fait une option très attractive.

Le dispositif est un succès. Il montre que la recherche n’est pas déconnectée des besoins de la société et de l’économie. C’est une voie que je recommande souvent aux étudiants brillants qui craignent de se couper du marché du travail.

Étude de cas : Les thèses CIFRE, un pont entre université et entreprise

Le dispositif CIFRE est un véritable accélérateur de carrière. Preuve en est, plus de 70 % des doctorants CIFRE rejoignent le secteur privé après leur thèse, contre moins de 50 % pour les docteurs issus du parcours classique. Face à ce succès, le gouvernement vise 2 150 contrats CIFRE par an d’ici 2027. Le témoignage de Lucy Pfliger, doctorante en sciences économiques chez France générosités, est éclairant : l’entreprise lui fournit des données et un réseau inaccessibles dans un cadre purement académique, lui permettant de rencontrer des spécialistes de la philanthropie qui enrichissent sa recherche. C’est la parfaite illustration d’une collaboration gagnant-gagnant.

Même sans viser directement le doctorat, proposer votre aide sur un projet, participer à un séminaire de laboratoire ou simplement demander à lire un article « en avant-première » sont autant de petites portes d’entrée. Il faut oser. Le pire que vous risquez est un refus poli si nous sommes surchargés, mais le plus souvent, votre initiative sera saluée.

Cette démarche proactive peut non seulement enrichir votre CV, mais surtout vous donner une vision concrète et passionnante de la manière dont le savoir se construit au quotidien.

La liberté académique : pourquoi ce principe est essentiel pour vous garantir un enseignement de qualité

Peut-être avez-vous déjà entendu cette expression, « liberté académique », sans trop savoir ce qu’elle recouvre. Ce n’est pas un privilège de professeur, mais un pilier fondamental de l’université et, surtout, une garantie pour vous, étudiants. Ce principe assure que mon enseignement et mes recherches ne sont dictés ni par des intérêts politiques, ni par des pressions économiques, ni par des dogmes. C’est ce qui me permet de vous présenter des théories contradictoires, d’explorer des sujets sensibles et de questionner les idées reçues, sans crainte de censure.

Cette liberté est inscrite dans la loi. Elle est le socle de notre indépendance intellectuelle et, par conséquent, de la qualité et de l’honnêteté de ce que nous vous transmettons. C’est une protection contre la propagande et la pensée unique.

Les enseignants-chercheurs jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent les principes de tolérance et d’objectivité.

– Article L952-2 du Code de l’éducation, Légifrance

Cependant, cette liberté est fragile et n’est pas une évidence partout dans le monde. Elle est même en recul. Des études récentes montrent que si en 2006, un citoyen sur deux vivait dans une zone de liberté académique, cette proportion est tombée à un sur trois en 2024. Ce recul est une menace directe pour la production d’un savoir critique et indépendant.

La France, consciente de cet enjeu, a mis en place des dispositifs concrets pour défendre ce principe au-delà de ses frontières. C’est une question de solidarité et de protection de la connaissance elle-même.

Étude de cas : Le programme PAUSE pour les chercheurs en danger

Lancé en 2017, le programme national d’accueil en urgence des scientifiques et artistes en exil (PAUSE) est une illustration poignante de cet engagement. En 2024, il a déjà permis d’accueillir près de 550 scientifiques venus de 43 pays. Ces chercheurs, comme Larissa Mies Bombardi qui étudiait les effets des pesticides au Brésil, étaient menacés dans leur pays en raison de leurs travaux. Ce programme ne sauve pas seulement des vies, il sauve des savoirs essentiels pour l’humanité.

Lorsque je suis devant vous, cette liberté me donne le devoir de vous présenter un savoir honnête, pluriel et critique. C’est la meilleure assurance que votre formation est bien une éducation, et non un endoctrinement.

Pourquoi un bon chercheur est souvent un meilleur professeur

Il existe un vieux débat dans le monde universitaire : un excellent chercheur fait-il forcément un bon pédagogue ? La réponse n’est pas automatique, bien sûr. Les qualités humaines de communication et d’empathie sont essentielles. Cependant, je suis profondément convaincu que l’activité de recherche, lorsqu’elle est menée avec passion, développe des compétences qui irriguent et enrichissent considérablement l’enseignement. Nous sommes plus de 56 000 enseignants-chercheurs dans les universités françaises, et cette double compétence est le socle de notre système.

Un chercheur n’est pas simplement quelqu’un qui « sait » plus de choses. C’est quelqu’un qui est en contact permanent avec la frontière de la connaissance, là où les certitudes s’effritent et où les questions sont plus importantes que les réponses. Cette posture a des conséquences directes sur la manière d’enseigner. Quand je prépare un cours, je ne me contente pas de répéter un manuel. Je l’actualise avec les dernières découvertes, les dernières controverses, les derniers articles que j’ai lus la veille pour une revue. Mon cours est vivant car ma discipline l’est.

Au-delà des connaissances factuelles, être un chercheur actif me permet de vous transmettre des compétences transversales, bien plus précieuses sur le long terme que la simple mémorisation de dates ou de formules. C’est le fameux « apprendre à apprendre ». Voici ce que mon activité de recherche m’aide à vous léguer :

  • La pensée critique : La recherche est une école du doute. Je vous apprends à ne pas prendre une information pour argent comptant, à en évaluer la source, à en analyser les arguments, à en déceler les biais.
  • La méthode scientifique : Que ce soit en histoire, en physique ou en sociologie, la démarche reste la même : formuler une hypothèse, la confronter à des données, et accepter de la modifier si les preuves l’exigent. C’est un outil intellectuel universel.
  • La résilience intellectuelle : La recherche est faite à 95% d’échecs, d’expériences qui ne marchent pas, d’hypothèses qui s’effondrent. Cette confrontation permanente à l’échec nous apprend l’humilité et la persévérance, des qualités que j’essaie de transmettre.
  • La communication complexe : Mon travail consiste à prendre des idées extrêmement sophistiquées et à les rendre intelligibles, que ce soit dans un article pour mes pairs ou dans un cours pour vous. C’est un exercice constant de synthèse et de clarté.

En fin de compte, un bon enseignant-chercheur ne vous donne pas seulement du poisson ; il vous apprend à pêcher, à naviguer et même à construire votre propre bateau pour explorer les océans inconnus du savoir.

Le doctorat en entreprise : le diplôme secret pour accéder à des postes de haut niveau

Parlons d’avenir. Le doctorat est souvent perçu comme une voie réservée exclusivement à ceux qui se destinent à une carrière académique. Cette vision est aujourd’hui largement dépassée. L’obtention d’un doctorat, et en particulier via le dispositif CIFRE, est devenue un véritable atout pour accéder à des postes de R&D, de stratégie et de direction dans le secteur privé. L’idée qu’un docteur est « trop qualifié » ou « déconnecté » est un mythe qui s’effrite rapidement, car les entreprises ont un besoin croissant de profils capables de résoudre des problèmes complexes avec une grande rigueur.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : avec un taux d’acceptation de 93% pour les projets CIFRE en 2023, le dispositif est non seulement accessible mais fortement encouragé. Mais concrètement, quelles sont les différences entre un doctorat « classique » et une thèse en entreprise ? Le choix dépend de votre projet professionnel et de votre personnalité. Chaque voie a ses avantages et ses inconvénients.

Pour vous aider à y voir plus clair, voici un tableau qui synthétise les principales différences entre les deux parcours. Il ne s’agit pas de dire qu’un modèle est meilleur que l’autre, mais de vous donner les cartes pour choisir la voie la plus adaptée à vos ambitions.

Doctorat académique vs Doctorat CIFRE : avantages et inconvénients
Critère Doctorat académique Doctorat CIFRE
Financement Contrat doctoral : environ 2044€ brut/mois CDI/CDD : minimum 2100€ brut/mois en 2024
Environnement 100% laboratoire universitaire 70% entreprise, 30% laboratoire
Débouchés Principalement académiques (50%) 70% vers le secteur privé
Réseau professionnel Essentiellement académique Double réseau : académique + industriel
Application pratique Recherche fondamentale dominante Recherche appliquée avec impact direct

Ce tableau met en évidence la complémentarité des deux systèmes. La thèse CIFRE offre une immersion professionnelle et un réseau industriel dès le début du parcours, ce qui explique son excellent taux d’insertion dans le privé. C’est une voie à considérer très sérieusement si vous aimez la recherche mais que vous vous projetez davantage dans l’innovation au sein d’une entreprise que dans une carrière de professeur d’université.

Envisager le doctorat n’est plus un vœu pieux réservé à une élite. C’est une stratégie de carrière concrète et valorisée, un investissement sur le long terme qui développe une expertise unique et très recherchée.

À retenir

  • L’activité de recherche constitue les deux tiers du travail d’un enseignant-chercheur et garantit un enseignement actualisé et critique.
  • Interagir avec un professeur sur ses recherches est le meilleur moyen de trouver un sujet de mémoire original et de se faire remarquer.
  • La liberté académique n’est pas un privilège mais un principe fondamental qui assure l’honnêteté et la qualité de l’enseignement que vous recevez.

Derrière chaque grande formation se cache un grand corps professoral : le guide pour enquêter sur vos futurs professeurs

Maintenant que vous comprenez mieux la mécanique interne du métier d’enseignant-chercheur, vous possédez une grille de lecture puissante. Vous pouvez l’utiliser non seulement pendant vos études, mais aussi en amont, au moment de choisir votre master ou même votre université. La qualité d’une formation ne se résume pas à une plaquette ou à un classement. Elle repose avant tout sur la qualité de son corps professoral. Apprendre à « enquêter » sur vos futurs professeurs est sans doute la démarche la plus intelligente que vous puissiez faire.

Cette enquête n’a rien de secret ou de déplacé. La plupart des informations sont publiques, car la diffusion de nos travaux fait partie de notre métier. Il s’agit simplement de faire preuve de curiosité et d’adopter une démarche proactive. Vous envisagez un Master en sociologie à Lyon ? Allez voir qui sont les enseignants-chercheurs de ce département. Leurs thèmes de recherche correspondent-ils à vos centres d’intérêt ? Sont-ils actifs dans la communauté scientifique internationale ?

Check-list d’audit : évaluer le profil de vos futurs professeurs

  1. Analyser leur impact scientifique : Consultez leur profil sur Google Scholar. L’indice H et le nombre de citations, sans être des mesures parfaites, donnent une idée de la reconnaissance de leurs travaux par leurs pairs.
  2. Accéder à leurs publications : Vérifiez leur page personnelle ou leurs profils sur des archives ouvertes comme HAL ou ResearchGate. Vous pourrez souvent y télécharger leurs articles en accès libre et vous faire une idée précise de leur travail.
  3. Repérer leur présence publique : Ont-ils écrit des articles de vulgarisation sur des plateformes comme The Conversation ? Interviennent-ils dans des médias spécialisés ? Cela témoigne d’une volonté de partager leur savoir au-delà du cercle académique.
  4. Identifier leur réseau : Regardez avec qui ils publient. Leurs co-auteurs fréquents vous renseignent sur leur réseau de collaboration, national et international.
  5. Comprendre leur rôle institutionnel : Sont-ils directeurs de Master, responsables de département, membres de jurys de thèse ? Ces responsabilités sont souvent un signe de reconnaissance et d’implication dans la vie de l’institution.

Étude de cas : Les enseignants-chercheurs YouTubeurs, la nouvelle vague de la diffusion

Une nouvelle génération de chercheurs investit des plateformes comme YouTube pour parler de science au plus grand nombre. Des personnalités comme Mehdi Moussaïd (Fouloscopie) ou Gilles Bailly-Maitre (Maths Adultes) rassemblent des centaines de milliers d’abonnés. Leur succès montre que la rigueur scientifique peut se marier avec des formats pédagogiques et divertissants. Suivre ces chaînes est aussi une excellente manière de prendre le pouls de la recherche vivante et de découvrir des domaines que vous n’auriez pas soupçonnés.

Cette démarche d’enquête vous rendra acteur de votre orientation. Pour la mener à bien, appuyez-vous sur cette check-list pour évaluer le profil de vos futurs professeurs.

En choisissant une formation, vous choisissez avant tout des maîtres à penser. En comprenant qui ils sont en tant que chercheurs, vous ne choisissez plus à l’aveugle, mais vous vous donnez toutes les chances de vivre une expérience intellectuelle riche et stimulante.

Rédigé par Olivier Lefebvre, Olivier Lefebvre est un ancien maître de conférences en sciences de l'éducation, avec plus de 20 ans d'expérience dans l'enseignement supérieur. Il est spécialisé dans l'analyse des structures universitaires et des parcours de réussite académique.